15:28 - Vendredi 29 mars, 2024

- 19. Ramaḍān 1445

L’enfant vertueux


Allah le Très Haut dit : Quand Joseph dit à son père : Ô mon père, j’ai vu [en songe], onze étoiles, et aussi le soleil et la lune ; je les ai vus prosternés devant moi [12;4]. L’enfant croyant, qu’incarne ici Youssouf, prend pour confident, pour guide et conseiller son parent vertueuxIl n’a de cesse d’honorer ses parents, depuis l’enfance, et jusqu’à la vieillesse, et quand bien même le destin fait de lui l’un des puissants de ce monde : Et il éleva ses parents sur le trône… [12;100]. Ceci étant, le fait de bien se comporter avec ses parents, d’être bon avec eux [birr al walidayn] fait parti des principes fondamentaux [oussoul] de toutes les révélations, et que le Coran et la Sounnah sont venus réaffirmer et réexpliquer. Allah le Très Haut lie le fait de n’adorer que Lui [al tawhid], qui est la plus noble des actions, la condition sine qua non d’entrée au Paradis et l’objet de l’appel de tous les messagers, au fait de faire preuve d’une grande bonté envers ses géniteurs. En effet, Il dit : et ton Seigneur a décrété : n’adorez que Lui ; et soyez bons avec vos parents. Si l’un d’eux ou tous deux doivent atteindre la vieillesse auprès de toi ; alors ne leur dis point : ‘Pfff !’ et ne les brusque pas, mais adresse-leur des paroles respectueuses ; et par miséricorde, abaisse pour eux l’aile de l’humilité ; et dis : Ô mon Seigneur, fais-leur, à tous deux ; miséricorde comme ils m’ont élevé lorsque j’étais tout petit [17;23-24]. Au travers de ce verset, Allah l’Exalté nous interdit de brusquer nos parents, de quelque manière que ce soit, ne serait-ce qu’en laissant passer un souffle d’agacement, et ce, quel que soit leur âge ! Il mentionne leur vieillesse dans ce verset, car à cet âge, leur comportement peut plus facilement nous pousser à l’impatience, et à les brusquer. Il nous recommande de faire preuve d’humilité et de prendre sur nous, nous rappelant comment eux, ont pris sur eux et ont patienté avec nous, lorsque nous étions de jeunes enfants. Il nous demande de nous montrer reconnaissants envers ceux, au travers desquels Il nous a appris tant de choses, et Il nous a comblés d’affection et de soutien,invoquant la clémence Divine en leur faveur. Le Prophète, paix et salut sur lui dit : Qui fait preuve de reconnaissance envers les gens, fait preuve de reconnaissance envers Dieu. À cet effet, le Coran est venu nous rappeler, à nous humains qui avons une fâcheuse tendance à l’oubli, les efforts fournis par nos géniteurs pour nous mettre au monde et pour nous élever. Allah dit dans Son Livre : Nous avons commandé à l’homme [la bonne conduite envers] ses parents. Sa mère l’a porté [subissant pour lui] peine sur peine [lors de la grossesse et de l’accouchement] : son sevrage a lieu pendant deux ans. Sois reconnaissant envers Moi ainsi qu’envers tes parents. Vers Moi est la destination [31;14]. Abdallah Ibn Mass’oud a interrogé le Prophète, paix et salut sur lui en lui demandant quelle était l’œuvre la plus aimée d’Allah azza wa jal, après avoir mentionné le fait de célébrer la prière dans son temps, le Prophète, paix et salut sur lui évoqua la bonté filiale [Al Boukhari & Mouslim]. À l’un de ses compagnons venu l’interroger en ces termes : ô Envoyé d’Allah, quelle est la personne méritant le plus que je fasse preuve de bonté à son égard ? Le Prophète, paix et salut sur lui répondit : Ta mère. Le questionneur demanda à trois reprises : Et qui ensuite ? Le Prophète, paix et salut sur lui mentionna encore la mère à deux reprises, avant de mentionner le père ! [Al Boukhari & Mouslim]. Par ailleurs, la Loi du Coran donne à la mère du défunt le double de ce qu’hérite le père ! Cette différence de traitement s’explique par l’effort [supérieur] que la maman fournit pendant la grossesse, la souffrance qu’elle endure durant l’accouchement et par le degré d’affection et d’amour qu’elle offre à ses enfants, souvent supérieur à ce qu’est capable d’offrir leur père, si aimant soit-il. L’Islam réclame donc de l’enfant musulman, qu’il fasse preuve d’un maximum d’égard et de tact envers ses parents Si tu t’écartes d’eux à la recherche d’une miséricorde de Ton Seigneur, que tu espères ; adresse-leur une parole bienveillante [17;28].

À l’inverse, l’insolence ou la maltraitance à leur égard, l’ingratitude envers eux, est un péché majeur qui conduira son auteur en enfer s’il ne se reprend pas. L’Envoyé d’Allah, paix et salut sur lui demanda un jour à ses compagnons par trois fois, s’ils voulaient savoir quels étaient les péchés capitaux et mentionna ensuite, immédiatement après le fait d’adorer autre que Dieu, le fait d’être irrespectueux envers ses parents [Al Boukhari & Mouslim]. Ainsi, les parents peuvent-ils être, dans l’Islam, une porte d’entre les portes du Paradis ou d’entre celles de l’Enfer, selon la manière dont ont les traite. Le Prophète, paix et salut sur lui dit : Fi le sot qui a rejoint dans leur vieillesse ses deux parents ou l’un d’eux et qui n’est pas entré au Paradis’ [Al Boukhari & Mouslim], c’est-à-dire qu’il n’a pas saisi l’occasion de leur âge avancé, et de leur dépendance à son égard pour se montrer bon et serviable envers eux, et ainsi mériter la miséricorde Divine. De plus, lorsque l’Ange Gabriel interrogea le Prophète, paix et salut sur lui sur les signes de l’Heure de la fin des temps ; l’Envoyé d’Allah, paix et salut sur lui mentionna trois signes caractéristiques de la dépravation des mœurs, parmi lesquels le fait que la servante enfantera sa maîtresse [Mouslim]. Nos savants interprètent cette parole comme le signe de la généralisation et de la banalisation de l’ingratitude et de l’insolence envers les parents : on verra à cette époque des jeunes adolescentes adresser des ordres à leurs mères et les réprimander comme si elles s’adressaient à leurs domestiques !

Le cas de l’enfant vertueux dont les parents ne le sont pas, ressemble au cas du prophète Ibrahim, et à celui d’un grand nombre de compagnons et de certaines épouses du Prophète, paix et salut sur lui. Or même dans ce cas là, la bonté et la reconnaissance sont de mise, sans pour autant permettre de désobéir à Allah dans des sujets relevant de l’obligatoire [waajib], de l’interdit [haram], objets de consensus [ijma’]. Allah dit : S’ils [tes parents] mènent contre toi une vraie guerre afin de te pousser à M’associer ce que tu ignores, ne leur obéis pas mais garde malgré tout avec eux un bon comportement dans cette vie… [31;15]. Le Prophète, paix et salut sur lui dit pour sa part : point d’obéissance aux créatures dans la désobéissance au Créateur [Mouslim]. Pour ce qui relève du souhaitable [mandoub], du déconseillé [makrouh], ou des sujets de divergence ; nous devrions parfois être capables d’assouplir un petit peu nos positions, si cela est à même d’apaiser un peu nos relations avec nos parents. Nous devons également dans ce cas, les appeler à l’Islam, en priorité, de la meilleure manière, avec tout le respect et la politesse que nous leur devons, à l’instar de notre père Ibrahim, lorsqu’il dit à son père, le vendeur d’idoles : Ô mon père, pourquoi adores-tu ce qui n’entend ni ne voit, et ne te profite en rien ? Ô mon père, il m’est venu de la science ce que tu n’as pas reçu ; suis-moi, donc, je te guiderai sur une voie droite. Ô mon père, n’adore pas le diable, car le diable désobéit au Miséricordieux. Ô mon père, je crains qu’un châtiment venant du Miséricordieux ne te touche et que tu ne deviennes un allié du diable [19;42 à 45]. Enfin, s’ils ne sont pas réceptifs à l’appel d’Allah, soit ils acceptent notre cheminement, auquel cas nous devons garder avec eux les meilleurs rapports ; soit ils s’y opposent, auquel cas nous devons nous montrer fermes sur nos croyances et nos principes, sans pour autant nous permettre à leur égard la moindre insolence ou la moindre injustice : Ibrahim dit à son père : Paix sur toi. J’implorerai mon Seigneur de te pardonner car Il m’a toujours comblé de Ses bienfaits. Je me sépare de vous, ainsi que de ce que vous invoquez, en dehors de Dieu, et j’invoquerai mon Seigneur. J’espère ne pas être malheureux dans mon appel à mon Seigneur [19;47-48].

Et Allah sait mieux !


Rubrique: Autour de la sourate Youssouf