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- 1. Dhū al-Qaʿda 1445

Saïd Noursi (1877-1960)


Abou Dawoud, Al Baïhaqi et Al Hakim rapporte que le Prophète, paix et bénédictions sur lui, a dit : A chaque siècle Allah enverra un rénovateur pour sa religion, sans préciser si il s’agira d’un individu ou d’un groupe. Al Iraqi et Al Souyouti ont authentifié ce hadith dont le sens est le suivant : l’Islam a été révélé par Allah, cette religion est complète et parfaite, mais avec le temps, les gens s’égarent souvent dans leur compréhension et dans leur pratique, le rénovateur est alors celui qui revivifie l’esprit originel de l’Islam et s’oppose aux hérésies et aux innovations.

Saïd Noursi est connu en Turquie pour être le rénovateur de son époque. Né en 1877 et mort en 1960, il vécut une triste époque : il vit la disparition de l’Empire Ottoman, la fin du Califat en 1922 avec la destitution du dernier Sultan et le déclin de la Turquie au rang de pays du tiers monde. Il combattit sa vie durant la doctrine athée et la conception matérialiste du monde qui faisaient de nombreux adeptes parmi les intellectuels et les notables turcs.

Enfant, il étudia à l’école religieuse. Il excella dans ces études qu’il acheva à l’âge de quatorze ans. Il faisait l’admiration de ses professeurs, pour sa faculté à mémoriser, son intelligence vive et sa facilité à débattre avec les savants. Saïd Noursi n’approfondit pas plus ses études islamiques auprès des savants et commença à étudier les sciences physiques et les mathématiques, puis plus tard la philosophie. Pour lui, si les sciences de l’Islam étaient encore tout à fait d’actualité, leur méthode d’enseignement n’était en revanche plus adaptée. Il fallait, selon lui, que l’école islamique puisse fournir aux enfants musulmans à la fois le savoir traditionnel et les sciences modernes, afin qu’ils ne puissent pas voir par la suite une contradiction entre l’Islam et le monde contemporain, et pour que les musulmans puissent participer au progrès technologique avec les autres nations. Certaines écoles adoptèrent son programme de réforme pendant quelques années. Croyant sincère et motivé, le jeune Saïd Noursi, se rendit auprès du Sultan à Istanbul pour solliciter des fonds afin de construire une université dans l’Est du pays. Il obtint l’aide désirée et les travaux débutèrent mais furent interrompus à cause de la guerre de 1914.

Saïd Noursi fut au premier rang pour combattre l’envahisseur russe. Il commandait ses troupes et les incitait à la bravoure en refusant de se cacher dans les tranchées et en faisant face à l’ennemi. Assis sur son cheval, il dictait alors à son scribe l’un de ses célèbres commentaires du Coran. Capturé en 1916, il réussit à s’échapper deux ans plus tard et à regagner son pays où il fit face, cette fois-ci, aux anglais. Bien que considéré comme un héros par son peuple, Saïd Noursi ne se réjouissait pas, il était plutôt affligé en voyant le déclin de l’Empire Ottoman et de l’Islam. Il décida alors de se retirer des affaires du bas-monde pour se consacrer à la méditation du Coran.

 

Invité par le jeune Moustapha Kemal, Saïd Noursi se rendit à Ankara. Son amertume fut grande quand il vit les notables négligeant aux obligations religieuses et adhérant à une philosophie contraire à celle de l’Islam. Il rédigea alors quelques petits ouvrages très simples où il expliquait au travers d’exemples et d’illustrations quelques versets coraniques pour ramener les gens à l’obéissance d’Allah. Mais ayant compris les intentions du parti Républicain au pouvoir, Saïd Noursi refusa les hautes fonctions qu’on lui proposait et préféra quitter Ankara pour reprendre sa retraite spirituelle.

Exaspérés par la politique anti-islamique du Gouvernement d’Atatürk et par l’oppression dont ils étaient victimes, les musulmans de l’Est se soulevèrent. Saïd Noursi ne prit pas part aux émeutes, il était pour une résistance pacifique faîte de patience et d’exhortations et ne voulait pas de guerre civile. Sachant l’influence spirituelle qu’avait Noursi sur les croyants, le pouvoir d’Ankara le fit exiler, espérant ainsi mettre un terme à sa prédication. Mais c’est finalement pendant les vingt-cinq années de son exil que Saïd Noursi dicta et enseigna sa compréhension de versets du Saint Coran. Ses élèves étaient de plus en plus nombreux et recopiaient à la main son commentaire de 6000 pages le Risale-i-nur. Avant que n’apparaissent les machines à dupliquer, 600 000 copies circulaient déjà dans les villes et villages de Turquie et des pays limitrophes.

Son commentaire se veut spirituel et n’est pas traditionnel, il s’appuie plus sur la réflexion que sur le hadith et les récits des compagnons et des anciens pieux. Saïd Noursi, connu en Turquie sous le nom de Bediuzzaman, fut sans conteste le grand réformateur de son temps : homme d’action, défenseur de la cause d’Allah et de Sa Parole pour laquelle il consacra sa vie, il fut le Moïse du Pharaon Atatürk, il ne céda pas et ne renonça jamais, jusqu’à ce qu’il soit rappelé à son Seigneur à l’âge de 83 ans. Qu’Allah l’agrée et lui fasse miséricorde !


Rubrique: Biographies