1:38 - Jeudi 25 avril, 2024

- 15. Shawwāl 1445

Abou Bakr le Véridique


ABOU BAKRAllah l’Exalté dit : « [de l’Enfer] le pieux Sera préservé / qui donne de sa fortune afin de se purifier / Par ceux qui profitent de sa générosité, il n’attend pas d’être rétribué / mais ne cherche que la Face de son Seigneur Élevé / Il sera certes satisfait » [92;17-21]. Ce verset fut révélé au sujet du fidèle compagnon du Prophète (paix et salut sur lui), Abou Bakr Al Siddiq. Il est un témoignage Divin du statut de cet homme, de sa piété, de sa générosité, de sa sincérité, du fait qu’il fut agréé par Allah et qu’il sera préservé dans l’au-delà comme il le fut ici-bas.

Abou Bakr fils de Abou Qouhafa, surnommé ‘Atiq – en raison de sa générosité et de sa beauté – naquit à La Mecque un peu plus de deux ans après le Prophète (paix et salut sur lui). Issu de la famille des Bani Taym, il partage avec l’Envoyé d’Allah (paix et salut sur lui) un aïeul en commun, en la personne de Murrah Ibn Ka`b.

Abou Bakr était un gentilhomme. Réservé et discret, on ne l’a jamais entendu déclamé quelque vers en public, comme cela se faisait à l’époque ; pas plus qu’on ne l’a vu boire la moindre goutte de vin, dont il avait remarqué quelques-uns des méfaits et desquels il voulait se préserver. On rapporte également qu’il se tenait à l’écart des superstitions et croyances des siens et que jamais il ne pratiqua le culte des idoles. Au contraire, son vif intellect l’avait fait s’intéresser aux anciennes religions révélées, sans pour autant adhérer à l’une d’elles. Habile commerçant, il était un homme aisé, honnête et apprécié des siens. Il connaissait déjà dans la période préIslamique, celui qui allait devenir le dernier Prophète. Ils avaient déjà eu à voyager ensemble pour le commerce et s’appréciaient l’un l’autre.

Abou Bakr fut la première personne à laquelle le Prophète (paix et salut sur lui) se confia, en dehors de son cercle familial proche, lorsqu’il reçut la Révélation ; celui-ci le crut aussitôt. Il était un homme intelligent et réfléchi, absolument pas superstitieux ; et pourtant il fut le seul – avec Khadija – à croire de façon immédiate et spontanée. Le Prophète (paix et salut sur lui) confirmera cela en disant : « Je n’ai invité personne à l’Islam sans qu’il n’hésita un moment excepté mon frère Abou Bakr qui n’hésita pas un instant ». C’est dire qu’Abou Bakr avait remarqué les qualités morales particulières du Prophète avant sa mission, comme il voyait l’incohérence des croyances et des religions de ses contemporains dont il connaissait le manque de moralité. À partir de ce moment Abou Bakr va devenir le premier et le plus fidèle compagnon du Prophète (paix et salut sur lui) et ce jusqu’à sa mort et même après celle-ci, puisqu’il en deviendra le successeur pour diriger la nouvelle communauté.

Abou Bakr va parler de la nouvelle religion autour de lui et faire de nombreux émules dans la bourgeoisie mecquoise. Il fut ainsi directement à l’origine de la conversion d’Othman Ibn ‘Affan, d’Abd Al Rahman Ibn ‘Awf, d’Abou Oubayda Ibn Al Jarrah, de Sa’ad Ibn Abi Waqqas ainsi que de Talha Ibn Oubayd Allah et Al Zoubayr Ibn Al ‘Awwam, tous ces individus auxquels le Paradis fut promis. Sa droiture, son intelligence, son bon caractère et son courage deviendront également des ambassadeurs de la nouvelle foi dans une société païenne qui ne tolérait pas un discours public remettant en cause ses fondements. C’est dire que même sans parler, par sa seule attitude, Abou Bakr posait des questions à ses concitoyens. Nombre d’entre eux ont été touchés par Abou Bakr et devinrent réceptifs par la suite au Message qu’ils avaient d’abord rejeté. ‘Omar Ibn Al Khattab fut parmi ces gens.

Abou Bakr, en sa qualité de gentilhomme, d’arabe et de mecquois, fut relativement préservé des persécutions qui frappèrent les plus démunis, parmi les réfugiés, les étrangers, et les convertis issus des classes sociales les plus modestes. La souffrance de ses coreligionnaires lui était insupportable. Aussi se ruina-t-il afin de libérer tous ceux qu’il pouvait du joug de ses concitoyens incroyants. Il libéra au total sept individus, parmi lesquels le célèbre Bilal Ibn Rabah, qui n’était pas loin de mourir du fait des actes de barbarie que lui faisait subir son patron, Oumaya Ibn Khalaf.

Nous disons qu’Abou Bakr fut relativement préservé, car il devait tout de même subir au quotidien tout genre d’humiliations, de moqueries et d’intimidations. Il fut même un jour passé à tabac et défiguré par un groupe de fanatiques mecquois, après qu’il soit intervenu pour défendre le Prophète (paix et salut sur lui). Ayant repris connaissance, sa première réaction fut de demander des nouvelles de l’Envoyé afin de s’assurer que celui-ci était sain et sauf !

Abou Bakr qui avait été habitué dans la première partie de sa vie à être respecté des siens et à vivre dignement, supportait mal le fait de se voir méprisé et raillé où qu’il allât. L’humiliation est en effet plus dure à supporter lorsqu’on la découvre tardivement. C’est certainement cette ambiance délétère et morose qui poussa notre compagnon à prendre la route de l’expatriation quand l’occasion se présenta. En effet, Abou Bakr, bien qu’il aimait tendrement le Prophète (paix et salut sur lui) se résigna à rejoindre ses compatriotes et coreligionnaires réfugiés dans le royaume chrétien d’Abyssinie. Mais en chemin, il renonça finalement à son dessein et décida de revenir parmi les siens.

Suite à l’évènement du Voyage Nocturne, et alors que les incroyants se gaussaient, certains musulmans se trouvèrent quelque peu perplexes. Abou Bakr quant à lui s’illustra une fois de plus par sa spontanéité et prêta foi immédiatement en l’évènement extraordinaire. « En effet, dit-il, je crois déjà en quelque chose de bien plus fantastique : je crois que Mohammad reçoit des informations du haut des cieux matin et soir ! ». Cette position ferme et singulière lui valut de mériter le titre de Véridique, Al Siddiq, pour l’éternité.

Abou Bakr fut finalement choisi pour accompagner le Prophète (paix et salut sur lui), lorsque l’exode devint nécessaire pour la communauté opprimée, comme l’immortalise le Coran : « Si vous ne lui portez pas secours, Allah l’a d’ores et déjà secouru lorsqu’expulsé par les incroyants, il trouva refuge, deuxième de deux, dans la grotte, et qu’il dit à son compagnon : « N’aies crainte, Allah est avec nous » … » [9;40].

La suite dans le prochain numéro.


Rubrique: Les Compagnons